Article de M. André Pedneault
Publié dans Québec Vert/Avril 1994
L'emploi des produits à base d'algues marines peut améliorer
significativement le développement et la qualité des
végétaux.
Au X11è siècle, les paysans des côtes de Bretagne
et du Portugal utilisaient déjà les algues comme amendement
pour améliorer et maintenir la fertilité de leur sol.
Les orientaux en avaient déjà réalisé
les bienfaits quelques siècles auparavant. L'usage des algues
marines en horticulture s'est répandu en Amérique
surtout à partir des années cinquante.
Des recherches démontrent alors que les algues améliorent
significativement les rendements et la qualité des cultures,
même appliquées à de faibles doses, en fertilisation
foliaire ou sur le sol. Des produits concentrés, sous forme
de farine ou de liquide, commencent à être distribués.
La popularité des algues n'a cessé d'augmenter depuis.
Aujourd'hui, les produits fertilisants à base d'algues font
maintenant partie de tout bon étalage de jardinerie. L'implantation
d'industries de transformation confirme la rentabilité d'un
tel marché.
Les ventes de ces produits peuvent augmenter. Bien des pépiniéristes,
des horticulteurs, des producteurs et des clients peuvent vérifier,
déjà après quelques jours, les conséquences
bénéfiques de l'emploi de ces produits sur les végétaux
( voir tableau #1, dernière page).
Des propriétés intéressantes.
Les recherches démontrent que les apports d'algues, aux
doses et aux périodes recommandées provoquent une
augmentation de la croissance, de la résistance et de la
qualité des végétaux.
Oligo-éléments et phytohormones
L'analyse de la composition des algues fraîches montre qu'elles
contiennent entre 50 et 60 oligo-éléments différents
en faibles doses. Une vingtaine d'acides aminés, des enzymes,
des antibiotiques et des hormones de croissance végétales
peuvent aussi être décelés.
Pour plusieurs auteurs, les propriétés des algues
proviennent des nombreux oligo-éléments qui se retrouvent
aussi dans les produits commerciaux concentrés. Ces éléments,
chelatés naturellement, sont facilement assimilables. Mais
les effets induits par une seule application dépassent le
simple apport d'éléments nutritifs dans plusieurs
cas.
La présence d'activateurs de croissance comme des cytokinines,
des auxines et gibbérellines est alors invoquée. Un
apport accru de ces phytohormones, naturellement présentes
chez les plantes, expliquerait les résultats observés.
Les cytokinines participent activement à la division cellulaire
et à la formation des membranes. Les auxines et les gibbérellines
favorisent l'élongation cellulaire.
Les hormones de croissance des algues fraîches ne se retrouvent
pas toutes dans les produits commerciaux. Les auxines, contrairement
aux cytokinines, plus stables, ne semblent pas conservées.
Les gibbérellines se dégradent au bout de quelques
mois. Quelques rares compagnies seulement garantissent la présence
de cytokinines dans leurs produits.
Les produits commerciaux
Aujourd'hui, dans le commerce, on trouve les algues marines sous
formes d'extrait liquide à différentes concentrations,
de poudre à diluer. Vu leur facilité d'utilisation,
ce sont les extraits liquides qui sont les plus populaires chez
les consommateurs.
En fertilisant foliaire, les formes liquides et les poudres à
diluer permettent d'obtenir un effet beaucoup plus rapide qu'une
application dans le sol. Les feuilles absorbent directement ces
extraits et transmettent les éléments nutritifs et
les substances actives aux autres cellules par l'intermédiaire
de la sève.
Utilité des extraits d'algues
Les produits à base d'algues sont des fertilisants complémentaires.
En tant que tels, leurs avantages, la quantité appliquée,
le temps et la fréquence d'application varient la selon la
qualité des sols, les fertilisants déjà employés
et le type de culture. Il s'agit de soupeser leur valeur selon le
besoin en oligo-éléments et en phytohormones.
Les effets les plus marqués sont constatés en fertilisation
conventionnelle où pratiquement seuls les principaux éléments
nutritifs sont apportés et en culture hydroponique. L'apport
d'oligo-éléments et de cytokinines, s'il y a lieu,
agit alors pleinement.
L'apport complémentaires en oligo-éléments
demeure rarement nécessaire lorsque des fertilisants naturels
riches en oligo-éléments comme le compost ou le fumier
sont employés en quantités suffisantes dans la fertilisation,
que ce soit pour les cultures sur sol ou hors sol. Les carences
en oligo-éléments sont très rares en agrobiologie,
mais des apports stimulants sont bienvenus.
L'intérêt des extraits d'algues devient alors beaucoup
plus axé sur la présence de cytokinines. Il serait
intéressant que des essais comparatifs sur l'efficacité
des produits à base d'algues soient effectués pour
l'agrobiologie.
Utilisation des produits
En général, les produits à base d'algues seront
surtout utilisés pour le trempage des semences, la transplantation,
le bouturage, le marcottage, avant la floraison et en période
de stress.
Les compagnies productrices recommandent d'appliquer les extraits
d'algues généralement tous les 15 jours. Cette fréquence
est adéquate en production de fleurs et en culture hydroponique.
Les applications sont plus espacées en agriculture biologique.
Les plantes recevront environ une application foliaire toutes les
quatre à six semaines seulement.
L'horticulture Yves Gagnon souligne qu'il est possible d'ajouter
30 kg d'algues en granulé par mètre cube de compost
lors de sa fabrication ou d'en appliquer directement dans le sol
à raison de 10 kg par 100m2.
La farine d'algues peut aussi entrer dans la composition des substracts
de culture. Les quantités de sodium et de chlore, qui varient
normalement de 2 à 4% dans la farine, ne sont pas à
craindre compte tenu des faibles doses appliquées, soit entre
0.25 et au plus 2% du mélange. Il s'agit de vérifier
la salinité du mélange pour les plantes sensibles.
Les algues pour phytoprotection
Sur une pelouse, l'application de farine d'algues à une
concentration de 2,8 kg/100 m2 durant trois ans contrôlerait
le Fusarium roseum au même titre que des traitement fongicides
avec du Bénomyl. Ces applications n'ont pas d'effets sur
la tache du dollar, le charbon strié et sur les larves des
scarabés japonais. Les populations de nématodes parasites
comme le Pratylenchus seraient réduits significativement.
L'application d'algues liquides tous les 15 jours ralentiraient
la prolifération des pucerons, des acariens et préviendrait
l'apparition des maladies foliaires.
Les causes exactes de ces propriétés antiparasitaires
ne sont pas clairement identifiées. Une meilleure résistance
de la plante, la formation d'un film protecteur sur les feuilles
ou la présence d'hormones pouvant agir sur le métabolisme
des parasites sont des hypothèses avancées, selon
les cas.
André Pedneault, Biologiste,
Consultant en horticulture écologique,
Conseiller horticole pour la Ville de Montréal et président
d'Eco-Option.
|